• Le film du dimanche soir (29)

    LES ANGES ONT PARFOIS DES NOMS DE TRAIN

    Hélène Dassavray

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    Épisode 29

    L'étoile du berger

     

    6 janvier. Comme les rois mages en Galilée…

    La tournée est terminée, tous les vœux sont bien souhaités, l'année peut enfin commencer. Je regarde mon passeport, il me donne le vertige. J’ai même l'autorisation de sortie du territoire, j’ai réussi à faire croire que la réunion avec la prof d'anglais était reportée en février. Cette pauvre prof qui a attrapé toutes les maladies de l'hiver, incapable d'assurer cette réunion tant attendue ! C'est un phénomène étrange, ils savent que je mens, dans l'intimité de leur conscience ils savent, mais ils ne veulent pas le voir. Ce serait beaucoup trop compliqué, il faudrait se poser des questions, réagir, prendre des décisions. Ils croient que l'ignorance est plus confortable, je suis persuadée qu'ils se trompent. Enfin pas tout à fait, bien sûr que l’ignorance est plus confortable mais pour moi ce n’est pas le bon chemin

    Pour ne plus revenir jamais, le minimum est de quitter le pays, ou alors trouver une bonne planque, et il faut vivre, manger. J’en parle avec Catherine, on a beau retourner le problème dans tous les sens, pas de solution miracle. Je me demande où je veux aller, j’entends la voix de Mina et son grand principe que j’ai déjà lu dans plusieurs livres et dont elle me saoulait, il faut bien l'avouer :
    - L'important ce n'est pas où on va, l'important c'est comment.
    Je n'en suis pas tout à fait convaincue. Pas pour moi en ce moment, l’important est de trouver un endroit où aller et peu importe la manière d’y arriver.
    J’ai récolté un peu d'argent à faire la tournée des grands ducs, ma mère a remarqué que je n'en avais pas dépensé un centime, elle a compris. J’en suis sûre à sa façon de me regarder, comme si j’allais mourir.

    Je téléphone au Rendez-vous, je vois exactement la scène : le vieux en casquette regardant les gens passer dans la rue, l'autre lisant le journal à deux tables de Mina assise sous le grand miroir et le patron grognon qui se penche à son oreille. Mais Mina n'est pas là, je rappellerai demain.

    Marie-Christine a débarqué dans la chambre de Catherine en larmes, on dirait que ce n'est pas gagné pour le mariage. Catherine philosophe :
    - Tout le monde a le cœur brisé un jour ou l'autre.
    J’en rajoute un peu :
    - Oui, si les parents ne s'en sont pas chargés, il y aura toujours quelqu'un pour le faire.
    Je me demande toutefois pourquoi Catherine a dit cela:
    - Qui t'as brisé le cœur à toi ?
    - Personne encore mais je sais bien que ça viendra.
    - Ce que j'aime en toi c'est ton optimisme.
    - Ce que j'aime en moi c'est mon putain de réalisme !


    Je rappelle Mina de la cabine près du collège, nous parlons longuement, une bonne partie de mes économies y passe mais l'oxygène n'a pas de prix, je respire à nouveau. Nous nous mettons d'accord et cela change la musique dans ma tête. Ces derniers temps j’écoutais plutôt du lourd, Black Sabbath, Deep Purple, aujourd'hui j’ai envie d'un reggae, ce nouveau type, là, Bob quelque chose.


    Ma mère entre dans ma chambre avec son regard triste et installe tout de suite une tension. Elle s'assied sur le lit à côté de moi, je n'aime pas son silence et sens que je ne vais pas aimer non plus ce qu'elle va me dire. Mais je me trompe, ma mère est plus fine que je ne le pense.
    - Tout ce que je veux c'est que tu sois heureuse.
    - T'inquiète pas maman, c'est tout ce que je veux aussi.
    - Mais…
    - Evidemment, il y a un mais !
    - Mais on ne peut pas échapper aux règles…
    - T'inquiète pas pour les règles maman, les lutins et moi on contrôle…

    A suivre


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